Au Monoprix près de chez moi d’avant, un jour ils ont reçu un arrivage de caissières sourdes et malentendantes. J’ai levé un peu mon sourcil droit. Tiens. Pourquoi. Mais en même temps, pourquoi pas hein. Elles sont plus ou moins entendantes, plus ou moins aimables, RAS. Enfin si, signalons-le, y en a une, malentendante, qui est plus agréable que toutes les autres caissières réunies. Toute souriante, sociable, on échange pas des milliers de choses, mais elle articule pas mal de mots, nous on fait l’effort de bien la regarder, d’articuler, d’être expressif, et ça roule tout seul, c’est presque un plaisir de passer en caisse, rare.
Et l’autre jour, à Cora, je vois qu’ils ont aussi leur lot de caissières + ou – sourdes.
Bon, ça commence à me questionner là. Surtout que celle-ci est totalement sourde. Elle montre le montant avec les doigts. Je dis bonjour en passant, je souris, elle ne me regarde pas alors ça ne sert à rien. Elle se concentre sur sa tâche et ensuite lève la tête, attend le règlement. On lève la carte bancaire pour lui montrer, elle enchaîne. En partant je dis au revoir, je souris, et là encore elle ne l’entend ni ne le voit.
Et il paraît que d’autres grandes surfaces ont eu cette super bonne idée d’embaucher des malentendants. Moi je veux bien mais POURQUOI ?
Est-ce que c’est le seul créneau qu’ils ont trouvé pour leur proposer une vie professionnelle ? Vraiment ? Quelqu’un trouve ça idéal ? C’est quand même LE poste du supermarché où tu es en contact avec les clients, où tu dois gérer les mécontentements, où tu dois être rapide. Je n’ose pas imaginer qu’ils ont inventé ça justement pour que les clients ne puissent pas se plaindre, pour limiter les interactions parasites, non, je n’ose pas.
Cette caissière me regardait tellement peu, j’ai eu l’impression qu’elle craignait la tentative de communication, dans laquelle elle aurait été en échec. Je suppose qu’à la moindre question d’un client, elle est obligée d’appeler un supérieur. Vla le boulot valorisant. Vla le sentiment de compétence.
Je me mets à la place de la nana, c’est un peu comme si on me mettait à un guichet, seule. Je serais capable de renseigner, donner des infos, et après ? Je devrais demander au client “vous pouvez prendre un ticket, là, sur la pile rose”. Et quand le téléphone sonnera “Cheeeef, vous pouvez me tenir le téléphone à l’oreille ?”. Je le vivrais mal.
Est-ce qu’il n’y a pas des milliers de boulots où leurs compétences, réelles, pourraient être exploitées ? Où elles (et ils, mais en l’occurrence, les caissières…) travailleraient dans un environnement plus propice, avec des gens qui pourraient s’adapter à leur spécificité de communication…
A vue de nez, je trouve cette politique “d’intégration” absolument absurde. Mais si quelqu’un a des arguments, peut m’expliquer le raisonnement à l’origine de cette idée bizarre (à part “il nous FAUT notre quota d’handis si on veut pas payer une taxe”), vraiment, je suis preneuse.
Franchement, me voici sur le cul, à la lecture des interventions, relativement scié par leur qualité, quant à la forme, et quant au fond. Concernant ce dernier, et s’il m’est permis un grain de sel, la concentration de personnes sourdes en un même lieu ne me paraît pas, a priori, bienvenue. Cela dit, et comme souvent, les choses ne sont pas simples.
je n’ai pas lu tous les coms, mais le mot ” frère” à propos des sourds m’a fait doucement rigolé.
j’ai voulu apprendre la langue des signes dans une structure sur toulouse, je garde un très très mauvais souvenir de cette ” communauté ” qui stigmatisait les sourds voulant se faire implanter.
vindicatifs, agressifs envers leurs “frères” entendants (et sourds qui ne partageait pas leur point de vue ), 6 ans après, je me sens toujours physiquement mal en repensant à ce qui ressemblait à une haine de l’entendant qui n’est pas comme eux.
et je peux vous assurer que nous sommes plusieurs à avoir éprouvé ce sentiment…
maintenant, vous pouvez rester sur votre petit nuage rose aussi.mais je crois que ces sourds-là étaient les pires ennemis de l’intégration de leur minorité.
Bonjour Fanfan,
D’accord avec toi, tu n’es pas la première ni la dernière à remarquer cela. Cette attitude, existe partout et est très développée en France suite à des choix arbitraires du monde politique. Comme je l’ai expliqué dans un post précédent, il y a une terrible et ridicule concurrence entre les écoles qui optent pour un mode d’éducation et de communication propre (LSF, LPC, bilingue, orale).
La communauté des Sourds est gravement stigmatisée et les maladresses du Corps médical qui encourage à outrance l’implant n’arrange pas les choses.
Moi personnellement, avec mes différentes associations, centres et services, je maintient ma politique d’ouverture et tous les Sourds, TOUS, doivent être traités de la même manière. Je ne fais aucune différence. Sauf que la Langue des Signes est la langue principale en usage dans les réunions, animations, ateliers.
Comme dans toutes les communautés socioculturelles, il y a des gens honnêtes et des d’autres qui sont contre toute proposition d’ouverture, d’intégration.
Merci de votre attention
oui, tous pareils : humains 🙂
bonne continuation.
Cela dit, je n’ai pas de réponse précise sur le pourquoi de cette armée de caissière dans tel magasin.
Quant aux opportunités de carrières, elles existent et elles sont rares, tellement il faut user de patience et de persévérance. Car les certificats d’études et les diplômes ne suffisent pas à prouver qu’on peut faire marcher un projet ou rentabiliser une entreprise.
Aucun étude n’a été faite dans ce sens, tout comme les chiffres exacts de la population des Sourds et malentendants dans le monde. Pourquoi ? Parce que nous dérangeons. Bon week end à vous
Peut-être une piste de réponse sur le pourquoi de cette vague, sur ce forum ou des Sourds font la même constatation que nous : http://levillagedessourds.fr-bb.com/t133-travailler-en-tant-que-caissier
Quelqu’un avance que “Défi sourd” aurait mis en place des formations en ce sens il y a quelques années, et que la chose se serait diffusée progressivement. (Je n’ai rien trouvé de plus précis à ce sujet)
D’ailleurs il existe encore ce genre de formation : http://www.unapeda.asso.fr/article.php3?id_article=1087
Voilà ce que j’ai pu glaner 🙂
Bien, je suis arrivée au bout de tous ces commentaires. Les esprits s’échauffent on dirait. Je ne suis pas sure que la LSF soit l’objet de ce post, mais connaissant mal le sujet, je n’en dirai pas plus. Cela dit, j’ai été choquée du propos de Maurice Hayard lorsqu’il assène “tu sembles terrblement renier la langue des signes et tes frères”. A mon tour de bondir, j’ai cru mal comprendre : “frères” ? Ce communautarisme me hérisse les poils.
Sinon, j’avais effectivement remarqué la présence de sourds dans les supermarchés. Les caissières sourdes avec qui j’ai eu à faire n’étaient ni plus ni moins souriantes que les autres. J’avoue que je me suis dit “bien, ils leur donnent une chance!” sans même trop y reflechir et je me suis réjoui de ces nouvelles recrues.
D’autres part, en lisant cette page, je me suis dit que notre société de communication excluait encore plus les sourds, mais que la communication d’aujourd’hui était numérique et que des ponts sont à envisager entre entendants et mal-entendants. Voyez sur cette page nous sommes égaux. Et si les caissières pouvaient écrire sur l’écran destiné aux clients ?
Et pour conclure des questions encore en suspens : d’où viennent ces nouvelles recrues, pourquoi une embauche massive de sourds-caissières dans nos supermarchés, quel partenariat est ainsi monté ? Je comprends que Celine cherche à comprendre.
Et comme dit plus haut, je m’interroge de mon côté sur les opportunités de progression de carrières qui leur sont réservées.
Je m’excuse si je vous ai choquée, mon but n’est pas là. C’est que je me suis mal exprimé.
Avouez quand même que vous y allez fort en employant des termes comme “frères” ou “fraternellement”… Personnellement, je voyais les “Sourds” plutôt comme des nationalistes (ce qui est normal quand on a une langue comme la LSF), mais c’est bien la première fois qu’on me donne l’impression de faire partie d’une secte 🙂
Comme j’arrive un peu après la bagarre (pacifique, rassurez moi ? :-)) je vais répondre sans entrer dans les détails. Oh de toutes façons je suis trop peu “qualifiée” pour avoir un avis précis ! 🙂
– En tant qu’entendante : Je trouve la LSF superbe, et j’aimerais qu’elle soit reconnue comme une “vraie langue”. J’ai choisi une initiation LSF à la fac, et j’aurais très certainement continué si mes gestes n’étaient pas si limités/fatigués. Et je trouverais ça génial qu’elle soit diffusée au grand public.
Mais bien sûr, je ne me prononcerais pas sur son impact pour un sourd par rapport au LPC, à l’oralisation et autres modalités… (En revanche je trouve très intéressant de vous lire sur ce sujet, vraiment !)
– En tant qu’handi : Je frémis aussi un peu quand je lis des choses comme “tu renies tes frères” parce que dans ma vie aussi je fuis à tout prix tout communautarisme. Mais j’ai cru comprendre que “la communauté Sourde” (qui n’englobe bien sûr pas tous les sourds) était assez construite, sur la base de sa langue, et d’une “culture” propre… Je trouve ça assez étrange, parce que ça ne fait écho à rien en moi (à part une crainte), mais je suis très intriguée aussi, encore en construction de mon propre avis sur la question 🙂
Merci à vous pour ces échanges passionnants.
C’est vrai que “frère” ou “fraternellement” dérangent quand on y porte une analyse négative. Ben, mon objectif n’était pas de blesser quiconque, mais de mettre en lumière la situation socioculturelle dans laquelle les amis Sourds et malentendants françaises se trouvent. Par “frère” je souhaite vous encourager à regarder la surdité d’un oeil plus positif. Et par “fraternellement” je voulais insister sur la solidarité entre les différentes tendances.
Car en France, davantage que dans les pays voisins, les scientifiques, les pédagogues et les mandataires politiques ont créé des structures éducatives terriblement cloisonnées et ont encouragé une rivalité féroce entre les filières éducatives. Combien de fois n’ai-je pas assisté à des joutes entre les Sourds, les devenus-sourds, les déficients auditifs, les LPCistes, les sourds parlants, les malentendants !
C’est bien connu que la vérité ne fait pas toujours plaisir à lire.
Vous assimiler à un membre d’une secte ? Votre interprétation est décidément bien maladroite.
Pas de problème Céline (mes excuses pour avoir mélanger mes pinceaux avec les prénoms et surnoms des différents intervenants), je reste cool et je défendrait mon point de vue jusqu’à ce qu’on me prouve que je vais dans l’erreur. Je ne peux m’empêcher d’avoir le sang qui bouillonne quand je lis des bétises. La vérité sur la situation, encore bien souvent pénible, a été trop souvent déformée et manipulée.
Merci de vos mots d’encouragements vis à vis de la Langue des Signes, c’est une très belle Langue qui doit absolument retrouver ses lettres de noblesse et être enseignée dès le plus jeune âge à tous les hommes et femmes. La Langue des Signes permet également à des nouveaux-nés “entendants” de développer leur intelligence et de pouvoir communiquer dès 6 mois (les expériences en France, en Scandinavie, en Angleterre et aux USA, sont concluantes et se développent), on attend l’aval des scientifiques pour multiplier les projets. Toutes les autres méthodes de support à la compréhension de l’oral et au déchiffrage du message phonétique, sont valables et complémentaires à la LSF. Malheureusement, la Langue des Signes a été condamnée et reniée parce qu’elle ne rapporte pas de rentrées financières au puissant lobby médical.
Concernant les Personnes Handicapées, comme tout citoyen, on est libre d’agir et de faire ce qu’on souhaite. Heureusement ! Je trouve justement qu’il y a un manque criant de collaboration inter-associations et très peu de solidarité. Comme dans tous les groupes sociaux, il y a des disputes et des désaccords, ce qui empêche souvent le communautarisme des idées et des revendications. Les zizanies et les dissensions permettent aux responsables politiques et au Gouvernement de n’accorder que des miettes aux Personnes Handicapées.
Bien sûr, vous avez parfaitement compris que les associations, centres, services et Fédérations de Sourds sont structurés (j’ai signalé dans un autre post que plusieurs étaient centenaires). Beaucoup d’entre eux ont besoin d’un renouvellement, d’un professionnalisme de leur gestion et surtout une adaptation à l’évolution rapide de la société.
Bon week end
Aucun souci pour les prénoms, je crois que tout le monde a vite corrigé ^^
Oui, pour la LSF j’ai deux amies entendantes qui l’ont utilisée pour communiquer avec leurs bébés entendants, avec plaisir et succès, je trouve ça très chouette ! C’est très ludique pour les enfants, ça pourrait être appris très facilement en maternelle…
Par contre, il me semble qu’il existe plusieurs langues des signes, selon les pays, non ?… Quel dommage, je vois grand là, mais si ça pouvait devenir une langue internationale, ça serait génial, et je suis sûre que ça pourrait motiver des entendants à l’apprendre ! 🙂
Pour ce qui est de fraternité / communauté de handicapés / sourds, moi ça me hérisse parce que je constate souvent l’idée que “entre handicapés vous devez bien vous entendre”, alors que non, moi je me sens beaucoup plus proche de personnes valides, sans renier aucunement mon handicap. Il ne me fait pas vivre dans un monde différent.
Concernant l’histoire des bébés qui ont avec leur maman appris la LSF et communiqué très tôt, j’ai eu difficile d’y croire tellement la situation est paradoxale et contradictoire pour les bébés sourds et leur maman (tout est mis en oeuvre pour qu’ils ne soient pas mis en contact avec la LSF et ne rencontrent pas d’adultes Sourds. Une véritable manipulation qui me donne froid au dos.
Oui, la Langue des Signes a perdu beaucoup de sa valeur initiale. Normal après plus de 100 ans d’interdiction et d’oppression (certains parlent même de génocide bien orchestré). La LSF s’est terriblement réduite pour devenir une dialecte propre à chaque institution (Reims, Nancy, Metz, Chambéry, Lyon, Poitiers, Bordeaux, Marseille, Nantes, Lille et Paris (entre 1900 et 1960). Chaque association a développé ses propres signes pour continuer à communiquer en cachette. Par exemple, dans les années 60 quand j’étais en institution les sections garçons et filles étaient séparées et rares étaient les contacts. Ce qui a conduit les jeunes à avoir des Signes parfois bien différents parce qu’ils étaient garçons ou filles.
Heureusement, malgré toutes les contraintes et les pressions, les Sourds ont survécus, ainsi que leur Langue et leur Culture. Chaque pays à sa Langue des Signes, certaines sont très proche (par exemple : les français, les belges, les italiens, les suisses, les américains, certains pays scandinaves, ainsi que des pays de l’Est sont semblables parce que leurs racines viennent de Saint-Jacques à Paris). Et malgré les différences linguistiques, la grammaire reste la même, ce qui nous permet de nous comprendre pratiquement partout. Au niveau des rencontres internationales, il y a une convention entre différents pays membres de la WFD (le XVIème congrès débute lundi à Durban http://www.wfd2011.com/home.html ),les principaux représentants ont adopté un langage et des signes compris de tous. Certains interprètes de haut niveau ont également suivi une formation supplémentaire pour pouvoir faciliter les communications internationales.
Encore une fois, c’est un problème d’information.
Pour ce qu’il en est de la fraternité/Associations de Personnes Handicapées/Fédération des Sourds, je peux vous comprendre parce que vous aspirez à la liberté d’expression. Politiquement c’est nul. C’est pourquoi, j’encourage les différentes associations à s’unir davantage pour parler d’une seule voix. N’oubliez pas que dans ces groupes, il y a aussi des milliers de parents, d’amis et de collègues qui soutiennent notre cause. Avoir des difficultés dues à une déficience n’est pas réservé uniquement aux Personnes Handicapées, il faut ajouter les seniors, les malades et les femmes enceintes. C’est un énorme poids politique qui est actuellement inexistant en Europe (plus pour longtemps).
Merci pour les liens vers les réponses que nous cherchons à comprendre. Bravo pour votre recherche.
Ne pas considérer les handicapés comme des frères ne veut pas dire que je les rejette, eux ou les associations. Mais dans la fraternité il y a quelque chose d’obligatoire. Or moi je n’adhère pas à TOUTES leurs revendications, je choisis les sujets qui me semblent dignes de m’investir. De la même façon, je peux militer pour des questions écologiques, parce que ça me préoccupe, sans pour autant considérer tous les écolos comme des FRERES. Ca s’appelle le libre arbitre. Ce ne sont pas des identités mais des convictions…
Sinon c’est encourageant de lire qu’il y a une unité qui se dégage quand même de toutes les langues des signes ! 🙂 Bon dimanche
Je vais vous raconter une situation comique vécue voici une vingtaine d’année.
J’étais a l’époque Agent des Finances dans une grande Administration et mon chef hiérarchique qui me soutenait dans mon combat pour la reconnaissance de la Langue des Signes et les Droits des Sourds, m’avait chargé d’assister le service réclamation des impôts.
Sans arrière pensée, j’ai tant bien que mal, assumer mes responsabilités d’accueillir, de rassurer, de calmer les plaignants et leur apporter une réponse à leur soucis.
Pourquoi à votre avis ?
Ben, se trouvant face à un Sourd, qui avec son grand sourire et ses grandes mimiques, leur demandait ne pas s’énerver, ne pas crier, ils en perdaient la parole. Pendant de longues années j’ai vu passer toute sorte de contribuables et rarement j’ai dû faire appel au service d’ordre.
Par la suite, j’ai démissionné de l’Administration et créé l’agence de sensibilisation SURDIMOBIL, qui se déplace avec ses équipes dans les écoles, dans les entreprises, dans les administrations et associations pour former les responsables, préparer les futurs collègues, à un meilleur accueil, une meilleure inclusion des Personnes Handicapées dans la société.
Étant moi-même sourde, la caissière sourde ne me choque pas… après tout, c’est la seule caissière avec qui je peux me permettre de papoter XD
Ceci dit, certains sourds ont des problèmes pour regarder les gens dans les yeux ou refusent toute communication verbale ou visuelle avec des entendants, cette caissière doit être mal à l’aise et donc ne voit pas les “bonjour” qu’on lui adresse. Mais d’un côté, vu le nombre de malotrus qui ne disent jamais bonjour aux caissières, elle est peut-être partie du principe qu’on ne pratiquait pas le “SBAM” à son travail.
Après, ce qui peut choquer, c’est que la personne ne soit pas à l’aise dans son métier, ne fasse pas d’efforts pour communiquer avec le client et en vient même à craindre toute forme de communication. Clairement, sa place n’est pas à un poste comme celui-ci, mais j’ai déjà vu des “entendantes” qui étaient très nulles comme caissières, alors ce n’est pas propre qu’aux personnes malentendantes.
Et puis, le métier de caissière, c’est vraiment stéréotypé, du genre : bonjour/vous avez la carte de fidélité/ça fera tel montant/merci/au revoir dans 99% des cas… donc ça laisse peu de surprises pour un sourd, quand même. Sauf quand une vieille mémé veut absolument bavarder avec la caissière pour avoir sa minute de vie sociale, mais là, il suffit de hocher la tête et de faire “oui-oui” avec un grand sourire puis une mine apitoyée de temps en temps quand la vieille mémé a l’air de raconter ses problèmes de santé (ça se devine aux grimaces qu’elle fait).
J’ai eu un problème de prix sur un article avec une caissière sourde, elle a simplement demandé à sa collègue voisine d’appeler l’accueil pour vérifier le prix de l’article, bref, c’est pas sorcier d’être caissière, surtout pour une sourde. Je le dis, car j’aurais bien voulu faire caissière une fois, mais le voisin qui bossait à Carrouf me disait non, et hop, je vois une caissière sourde dans ce même Carrouf où il ne voulait pas me faire embaucher…
Alors là, je dis que le plus grand obstacle, ce n’est pas le handicap lui-même, mais la vision qu’ont les gens de cet handicap. Ce n’est jamais le sourd qui dit qu’il ne peut pas piloter un avion, pratiquer la médecine, devenir avocat, tenir une caisse et plein d’autres métiers, c’est l’entendant qui prétend qu’il ne peut pas le faire. C’est l’entendant qui est l’obstacle aux ambitions d’une personne sourde. C’est l’entendant “bien-pensant” qui met des bâtons dans les roues de la carrière d’une personne sourde.
Tout le monde part du principe qu’un handicapé ne peut pas faire tous les métiers du monde.
C’est peut-être vrai, et après tout, même un valide ne peut pas faire tous les métiers du monde, mais c’est à l’handicapé d’en juger lui-même, sans être formaté par les influences « bien-pensantes » extérieures. J’aurais bien voulu faire médecine, j’ai l’intelligence et les capacités pour cela, c’est juste ma flemme qui m’en a empêchée. Mais je pense à cette sourde qui voulait faire infirmière, qui a fait les 3 ans d’école d’infirmière jusqu’au bout, et qui a été recalée à l’examen final malgré ses bonnes notes “parce qu’une sourde ne peut pas être infirmière” de l’avis du jury… mais par contre, elle pouvait être aide-soignante (dont le boulot est à 95% celui de l’infirmière, avec un salaire moindre).
Et ça, c’est vraiment crétin.
Et concernant le quota d’handicapés dans les entreprises, pour avoir été recrutée récemment, j’étais avec d’autres personnes reconnues travailleurs handicapés… mais leur handicap était tellement discret, tellement léger à côté du mien (eux-mêmes le reconnaissaient et s’étonnaient qu’on ait aussi recruté une personne avec un handicap aussi “lourd”) qu’on sentait quand même le foutage de gueule de la part des recruteurs qui veulent embaucher de l’handicapé mais du pas trop voyant surtout…
Personnellement, en tant que personne sourde parfaitement libre de ses mouvements, j’ai toujours été perplexe devant les tétraplégiques qui ne pouvaient bouger guère plus que leur tête mais qui travaillaient quand même comme ingénieurs ou cadres… Et surtout comment ils étaient arrivés à se faire embaucher quand un sourd n’y arrive pas. J’ai vu le témoignage d’un tétraplégique qui travaille à l’accueil d’une mairie qui disait qu’il avait dû se lever tous les jours très tôt le matin pour se préparer puis venir harceler la DRH de la mairie pendant plusieurs mois avant d’être enfin embauché. Si ça, c’est pas de la ténacité…
Waouh, merci pour ce long avis ! ^^
Encore une fois, la caissière sourde ne me choque absolument pas non plus ! Ce qui me choque c’est le côté “merde, qu’est-ce qu’on va faire de tous ces sourds, ben on va les mettre à la caisse”. Je sais pas, c’est vraiment l’effet de masse, dans plein de magasins différents, qui me surprend.
Parce que comme tu le dis, les entendants ont beaucoup de mal à envisager l’intégration, alors si en plus il faut proposer de bons postes, ah non hein, ça faut pas abuser… 🙂
Et j’ai aussi vécu une réunion pour travailleurs handicapés, quand je cherchais des aides pour la création de mon entreprise, et l’ensemble de l’assemblée avait mal au dos / mal au pied / mal au petit doigt, et je me sentais une Ovni du coup !
Ton exemple de l’infirmière devenu aide-soignante est hallucinant de la connerie du milieu du travail… 🙁 Pourtant moi je vois la chose de façon inverse : avec un handicap, qu’il soit physique ou sensoriel, les jobs de “bas niveau” nous sont fréquemment interdits. Par exemple je ne peux pas être caissière, je ne peux pas balayer les rues, je peux pas travailler à l’usine, à la chaîne… Par contre, si je veux étudier, développer une compétence précise, compatible avec mes limitations, je considère que tout m’est ouvert. C’est aussi dans ce sens là que je m’étonne de cette vague de caissières sourdes, je les trouveraient beaucoup plus à leur place dans des boulots plus “pointus”… (Mais Maurice Hayard m’a signalé qu’en cas du surdité, les études supérieures étaient encore peu pratiquées…)
Pour revenir plus précisément à nos caissières sourdes :
Ouiii, j’avais pensé à ce seul avantage : permettre à des sourds de communiquer facilement avec une caissière ! 😀
Je suis d’accord avec toi, concrêtement être caissière et sourde est tout à fait compatible, pas si sorcier. Mais vraiment, j’en ai vu plusieurs qui semblaient très mal à l’aise à cette place, et du coup c’est très gênant d’être face à elles. C’est vrai aussi que des caissières entendantes n’en font pas plus, et ne le vivent pas mieux, merci de le rappeler 😉
Sinon t’en dis quoi d’interpeler ces groupes qui se veulent “intégrants” sur le thème “vous avez embauché des caissières sourdes, maintenant donnez nous les moyens de communiquer avec elles, faites des campagnes d’initiation à la LSF” ? 🙂
Bah, ça m’étonne aussi cette embauche en masse de caissières sourdes dans les magasins, quoique je me demande où tu habites pour avoir vu ça, car chez moi, c’est à peine si j’en vois une fois par an de caissière sourde… et elles ne restent pas longtemps à leur poste, j’ignore ce qu’il advient d’elles par la suite.
Là, ça me fait penser à une école de sourds qui passerait un contrat avec un supermarché, ou avec des stages d’insertion professionnelle pour leurs élèves sourds… reste à voir si ça dure dans le temps.
Concernant l’accès à l’emploi des handicapés, les sourds, c’est tout le contraire : on leur réserve les jobs de « bas niveau », soi-disant parce qu’ils ne sont pas à l’aise dans la communication orale ou écrite, ils seraient limités intellectuellement. D’ailleurs, dans les écoles pour sourds, ils n’allaient que jusqu’au CAP ou BEP. Ca ne fait pas très longtemps, d’ailleurs, que de plus en plus de sourds passent le bac. On a même fait un article quand j’ai eu mon bac et pourtant c’était y a tout juste 10 ans… A vrai dire, les sourds qui vont « loin » sont surtout issus de familles cultivées avec un haut niveau d’éducation et donc d’intégration dans la société entendante (ils vont à l’école normale comme les autres enfants). Ce sont des sourds qui n’apprennent pas la langue des signes, qui sont à l’aise en communication orale, parce qu’ils n’ont fait que ça toute leur vie. Et évidemment, ils sont beaucoup plus discrets et plus facilement employables que les sourds qui pratiquent la langue des signes et restent entre eux.
N’en déplaise à Maurice Hayard, je ne suis pas pour la promotion de la langue des signes en dehors des milieux consacrés à la surdité, car d’une part, c’est une langue propre aux sourds, donc pas « naturelle » pour un entendant (ce serait comme demander aux français d’apprendre le japonais !). Et d’autre part, la plupart des entendants ont rarement l’occasion de fréquenter plus d’un ou deux sourds dans leur vie, donc autant réserver l’apprentissage de la LSF à des gens vraiment motivés et qui ont l’occasion de côtoyer des sourds signants tous les jours… s’ils en trouvent, parce que les sourds LSF, c’est le sommet de l’iceberg de la surdité, et la partie cachée de l’iceberg, c’est 90% de sourds et malentendants qui ne connaissent pas la langue des signes et n’ont ni eu le besoin ni l’occasion de l’apprendre, car ne côtoyant que très peu d’autres sourds. Et qui ne se font pas entendre, parce qu’ils ne sont pas organisés en associations militantes comme le sont les sourds signants.
Et c’est pour ça que je trouve que les gens qui veulent promouvoir la LSF ou imposer par exemple des interprètes LSF partout manquent surtout un peu de réalisme, car si seulement 10% des sourds en auraient l’utilité, qu’est-ce qu’on fait des 90% qui n’ont pas besoin de LSF mais surtout d’une meilleure compréhension de leur handicap par les entendants ?
Ce qu’il faudrait surtout, c’est une vraie sensibilisation à la surdité chez les entendants, car c’est un handicap méconnu qui fait que la surdité est considérée comme une fierté par une petite partie des sourds (qui se désignent comme Sourds avec une belle majuscule) et vue comme une honte par la majorité des sourds et malentendants qui font tout pour minimiser ou cacher leur handicap… et ils y arrivent très bien en général, une caissière « malentendante » comme ça, tu remarquerais jamais qu’elle a un problème d’audition, elle va même jusqu’à cacher ses prothèses auditives.
Un peu comme la personne en fauteuil roulant qui ne veut surtout pas montrer qu’elle est en fauteuil roulant, peu importe les efforts que cela lui coûte…
Ben Clea, tu souffles le chaud et le froid, d’un côté, tu déchiffres bien une part de problèmes éducatifs de l’enseignement spécial. Tu es proche de la vérité.
D’un autre côté, tu sembles renier terriblement la Langue des Signes et tes frères. Heureusement que nous avons des organisations militantes (certaines largement centenaire) pour défendre notre cause et faire respecter nos Droits.
Sache qu’aucune des associations, centres ou services que je fréquente ne renient les malentendants et devenus-sourds non signants. Je peux comprendre que tu as été élevée dans le déni de ta surdité, de la Langue des Signes et de tes semblables Sourds, sourds et malentendants.
Mais écrire des erreurs maladroites en affirmant que “Ce sont des sourds qui n’apprennent pas la langue des signes, qui sont à l’aise en communication orale, parce qu’ils n’ont fait que ça toute leur vie ” Là tu te trompes joliment. J’en suis un exemple et ne suis pas le seul. A te lire, les Sourds sont maudits d’être bien dans leur peau, d’assumer parfaitement leur surdité (je le suis aussi).
Nous ne sommes plus en 1950-1960 pendant la période à laquelle nous les Sourds, avons soufferts, avons été injustement discriminés, parce qu’on a tout fait pour faire disparaître notre Langue des Signes, parce qu’on a fait tout pour que nous soyons “déficient auditif”, nous avons été obligé “entendre” et “parler”, on nous a attaché nos mains, on nous battus pour que nous soyons “normaux”. Il n’y a pourtant pas si longtemps de cela.
Probablement que tu ne le sais pas, probablement qu’on t’a caché la vérité pour que tu sois “normale”. Je te comprend, tu n’est pas la seule. On ne t’a probablement jamais dit que la LSF est en France sur le point de devenir une Langue à part entière et qu’elle est reconnue comme telle dans d’autres pays. On ne t’a probablement pas dit que les Droits de la Personne Sourde sont repris dans la nouvelle Convention des Nations Unies et que les Sourds, tout comme les sourds et malentendants, ont le droit de revendiquer des services équitables, d’avoir des écoles adaptées, d’avoir des interprètes, des codeurs LPC, des aides en communications, et bien sûr un emploi en rapport avec leurs compétences et leurs capacités.
Rien n’est parfait, mais chacun à le droit de rêver et d’espérer une vie “normale” comme l’autre. En Europe, il y a aujourd’hui 4 Sourds qui ont été élus députés et qui siègent à des postes importants. Moi-même, je suis directeur d’agence de communication et ai sous ma responsabilité 18 personnes entendantes et 7 sourds et malentendants.
Fraternellement
Je n’ai jamais été élevée dans le déni de ma surdité. Ca aurait été impossible : je fais partie des rares sourds atteints de cophose bilatérale non implantable. Pour ceux qui ne connaissent pas : je suis totalement sourde. Aucun reste auditif exploitable, même avec la technologie actuelle (prothèses et implant cochléaire ne fonctionnent pas). On ne peut donc pas trouver plus sourd que moi !
Je n’ai pas été élevée dans le déni de mes semblables. Au contraire, j’ai de la famille sourde et j’ai des amis sourds signants 😉
Je ne renie pas la langue des signes, je suis simplement réaliste sur son utilité. Pour moi, c’est une langue qui se pratique entre sourds, pas dans une société où 99% des gens préfèrent communiquer oralement entre eux. Pour la majorité des entendants, ça reste et ça restera toujours une curiosité. Que je sache, les aveugles ne cherchent pas à faire apprendre le braille à tous les voyants !
Il est vrai que je suis une sourde des années 80, je n’ai pas souffert dans la rééducation orale comme les sourds plus vieux, et évidemment, j’ai un discours différent. Ce n’est pas du formatage ou du déni, c’est simplement qu’on m’a donné la chance d’apprendre et d’aimer ma langue maternelle qu’est le français.
Je connais bien le discours “pro-LSF”. Je suis d’accord sur certains points, mais pas sur d’autres. Il faut arrêter d’être rancunier contre l’oralisme à cause des erreurs du passé (et dieu sait comment les médecins et les profs ont pu être stupides autrefois et pas seulement qu’avec les sourds). Ca a énormément évolué depuis, et le petit sourd d’aujourd’hui n’est plus torturé comme avant pour apprendre à parler. Au contraire, il passe surtout son temps à jouer chez l’orthophoniste. Comme le code LPC, il existe désormais des méthodes plus souples et plus faciles pour oraliser.
Je pense qu’on est tous d’accord sur un point : il faut que la personne sourde puisse être autonome dans la société, et ça veut dire qu’elle doit pouvoir se passer de son interprète LSF quand il le faut 😉
Voilà, désolée, Céline, si les commentaires se transforment en dispute pro-LSF vs pro-oraliste, c’est un très vieux débat dans le monde des sourds qui finit souvent par tourner au troll. Tu peux parfaitement modérer nos discussions si tu juges que c’est nécessaire.
Céline, vous avez un point de vue différent. je le respecte et vous avez le droit à la parole puisque nous sommes dans un pays démocratique (heureusement).
Dommage que vous continuez à écrire n’importe quoi sur les Sourds et la Langue des Signes. Vous écrivez que “99 % des sourds préfèrent l’oral” et un peu plus loin, vous dite “les aveugles ne cherchent pas à faire apprendre le braille aux voyants”. Je ne sais où vous avez été chercher cette information. Au moins prenez le temps de vérifier avant d’écrire ces information inexactes.
Sachez que le “braille” n’est pas une langue mais un outil qui est loin d’être une Langue à part entière.
Un peu plus loin, vous écrivez que je suis rancunier et que l’éducation à évolué. Encore une fois, vous lancez des affirmations sans avoir vérifié la situation sur le terrain. Si vous le souhaitez, je peux vous organiser une visite de plusieurs régions où la situation éducative des jeunes Sourds n’a pas évolué.
Je suis navré que vous soyez aussi mal informée et que vous ne refusez la réalité des choses.
Il existe des milliers de boulots mais qui soit facilement adaptable et disposant de nombreux postes sur toute la France, il ne doit pas y en avoir tant que ça, surtout pour des personnes n’ayant qu’une formation générale comme ce doit être le cas de ces caissières. Tu as l’air de trouver ce poste avilissant mais pour cotoyer des personnes travaillant dans la grande distribution je t’assure que les caissières font parti des mieux lotties de cette grande famille.
Des boulots facilement adaptables à la surdité ? Oh si, je pense qu’il y en a beaucoup quand même ! Pourquoi on a pas décidé que les sourds seraient boulangers, mécaniciens, assistantes mat, informaticiens ou des milliers d’autres jobs. Mais de préférence ceux où on ne doit pas avoir à faire à 12 personnes à la demi-heure ! 🙂
Je sais pas, moi tous les caissiers que je connais l’ont très mal vécu (d’être traités comme de la merde, tant par les clients que par la direction), et ont arrêté, ou alors sont montés en grade et le vivent (un peu) mieux…
Très intéressant débat, s’il en est.
Cependant, dans cette réponse, je comprends mal tes arguments.
D’une part les métiers que tu cites sont des métiers où le contact (commercial ou non) avec le public est désormais requis. Les boulangers, mécanicens, informaticiens sont de moins en moins confinés à l’arrière boutique. La polyvalence est de mise et par exemple pour prendre mon cas, c’est bien mon boulanger (je veux dire celui qui est aux fourneaux) qui aide sa femme à la caisse. L’avantage pour le client c’est qu’on peut lui demander des infos précises sur ses pâtisseries (mais c’est à mon avis un choix purement économique). Idem avec mon garagiste qui vient mencaisser les mains toutes noires en m’expliquant tout ce qui n’allait pas sur ma voiture et justifie par là la note salée (un échange pour moi indispensable pour ne pas avoir l’impression de se faire totalement arnaquer). Je ne parle même pas des Atsem qui échangent quotidiennement avec 30 marmots dont l’articulation n’est pas toujours parfaitement au point.
Attention, je ne suis pas en train d’expliquer par le menu qu’aucun poste ne conviendra jamais à un sourd. Je fais juste écho au précédent commentaire qui expliquait que la mise en place de ces insertions demandait à être vraiment bien pensée en amont. D’autant que lois sommes dans un monde de communication.
D’autres part, tu dis que les caissières sourdes vivent mal ce travail ? Tu peux enlever sourdes de ta phrase. C’est un boulot ingrat, j’espère qu’on en a tous conscience. Personne ne rêve de faire ça. Et entendante ou non, les caissières n’ont pour ainsi dire pas le droit de répondre en détail à un client mécontent. À la moindre polémique elles doivent de toutes manières appelez quelqu’un. On estime, et je trouve ça en partie exacte, que ce n’est pas leur rôle de gerer ces conflits et que par manque d’information elles pourraient porter préjudice à l’image de l’établissement.
Et pis nombreux sont ceux et celles qui commencent petit et évolue après. Moi, je voudrais surtout savoir le taux d’handi salariés qui sont montés en grade au même rythme que leur valide-collègues. Ou si on les condamne au bas de l’échelle malgré leurs compétence ?
Oui, j’ai des cité des emplois où le contact humain n’est pas absent, parce que ça serait bien trop facile de dire “les sourds ne peuvent pas communiquer, enfermons les dans des bureaux ou usines”. Mais dans mes exemples, je voyais des choses à échelle humaine, des atmosphères propice à la communication non stéréotypée, non chronométrée comme dans une grande surface. Communication parce que travail en équipe (une équipe stable et de taille raisonnable), et aussi communication ponctuelle avec la clientèle, quand c’est possible ou souhaité, seul ou à plusieurs…
Et pour l’assistante maternelle, je ne pensais pas à l’atsem, effectivement débordée, mais à une nourrice gardant 3 ou 4 gamins, qui pourraient rapidement apprendre la LSF (ou autre).
Et oui Céline, mais moi je trouve ca plutôt bien de positionner des TH sur ce genre de poste. Ca montre aux autres, que les différences s’effacent peu à peu et je pense qu’il faut tabler là dessus.
Quant aux 6%… vaste question ou belle fumisterie ? En tout cas, je suis pour ces 6%, ca ‘a permis de trouver un poste 😉
A++
Je ne parle pas de “positionner des TH” mais d’humain.
Je ne pense pas qu’il faille “montrer” ce genre de choses, dans le genre “Oh Roger tu sais quoi, chui allée au Cora, ben y avait une sourde ! Mais elle a l’air gentille quand même hein !”…
Je ne crois pas, et n’espère pas que les différences s’effacent. Au contraire, elles doivent s’affirmer. Ca ne m’intéresse pas de dire ou d’entendre “Regardez, je suis handi mais je peux presque aussi bien qu’un valide, faire un boulot de merde”. Moi je veux dire “Je suis handi, je suis déficiente, incapable de certaines choses, par contre, regardez toutes les ressources supérieures aux vôtres dont je dispose et que je peux mettre à votre service”
Le titre ne m’étonne pas, mais le contenu me fait bondir.
Tout d’abord, une personne sourde peut très bien postuler pour un emploi de caissière sourde. Car, à première vue, comme ce poste demande une grande concentration, une patience, une résistance aux bruits ambiants, une résistance au stress, aux plaintes des clients. La personne sourde résiste mieux à ces pressions externes qui ne risquent pas de perturber trop l’encodage des marchandises.
Si un problème se poste avec un(e) client(e), en fonction des origines de sa surdité, la personne sourde peut comprendre ou répondre, si le client prend la délicatesse de parler doucement, de bien articuler, de ne pas crier ou de faire quelques signes.
Car cette démarche peut également être une campagne promotionnelle de la Langue des Signes. C’est probable qu’une grande société de distribution a décidé de sponsoriser un projet éducatif de sensibilisation de la LSF. Ce qui permettra aux clients d’apprendre quelques signes, quelques trucs pour mieux communiquer.
J’ai connu une entreprise de restauration qui avait souhaité agir pour la promotion de la Langue des Signes et une éducation permanente de ses clients. Cela a très bien marché et espérait un jour que cela pourrait se renouveler à grande échelle.
Aujourd’hui, les Personnes Sourdes et malentendantes aspirent à un plus large choix des professions et métiers accessibles pour eux. A la base, les institutions d’enseignement spéciales ne sont plus à la hauteur des attentes de la génération montante. Par contre, du côté des 10-15 % des Sourds et malentendants qui suivent une scolarité dans l’enseignement ordinaire, ils aspirent à des postes à responsabilité (ingénieur, électrotechniciens, ENA, psychologie, droit, science-politique). Ce qui fera sous peu des cadres de haut niveau qui seront loin des caissières.
Bonjour, merci pour ces intéressantes pistes de réponses. J’y reviens point par point.
– “une personne sourde peut très bien postuler pour un emploi de caissière” : Ah mais ça oui, bien sûr ! Si la personne le souhaite, postule, si la direction est ouverte, prête à tenter l’expérience, je trouve ça vraiment super, et ça me réjouis. Moi ce qui me dérange vraiment c’est le côté “effet de masse”. Que plusieurs groupes de grande distribution aient eu cette idée de recruter en grand nombre des personnes sourdes (pourquoi pas d’aveugle, de handicapés physiques ?… Je n’en vois pas) pour être caissières (et uniquement à ce poste, pourquoi ?), ça ça m’interroge. Pourquoi pas hein, mais je voudrais vraiment comprendre leur démarche, et sur internet je n’ai rien trouvé à ce sujet, les groupes ne communiquent pas sur leurs intentions.
– Je n’avais pas considéré que ce travail était extrêmement bruyant. Mais peut-être. Si ça peut être un “plus”, tant mieux. Mais pour moi le côté stressant du boulot vient plutôt des rapports difficiles avec des clients inciviles, alors ça m’interroge aussi. Je redoute que la direction se réjouisse “ahah, face à une caissière sourde les clients n’oseront pas râler, ils partiront plus vite” mais j’espère sincèrement que je me trompe sur ce point ! 🙂
– En cas de problème, la caissière évoquée dans mon premier paragraphe déployait effectivement différentes tentatives de communication (moitié oralisation, moitié gestuelle), et on s’en sortait très bien. Mais la majorité des autres se contentaient d’appuyer sur un bouton pour appeler un supérieur, et c’est en cela que je trouve que ça les mets dans une délicate position d’incapacité, qui ne me semble pas traduire une “intégration” réussie, épanouissante…
– A propos de la LSF, ah oui, là je suis entièrement d’accord, ça serait absolument génial, et justifierait entièrement cette politique d’embauche, alors !
Par contre, pour avoir cotoyé le Monoprix et ses caissières sourdes pendant plusieurs années, je n’ai jamais vu une allusion à cela. Leur seul investissement a été d’offrir un badge “je suis sourde” aux caissières concernées… :-/ Même les caissières, je ne les ai jamais vu signer, pas même un bonjour ou un au revoir, qui pourrait pourtant être facilement compréhensible par le client, minuscule premier pas… Alors je ne sais pas si ce sont elles qui seraient gênées de le faire, où si la direction leur déconseille, dans l’idée que le client (un peu bêta) pourrait le prendre comme un coucou familier ? Ca serait intéressant à creuser.
En tous cas, que cette vague de caissières puisse être un moyen de diffuser la LSF, je trouverais ça vraiment génial. Pourquoi ne pas interpeler sérieusement ces grands groupes en leur disant “Très bien, vous avez mis en poste des caissières sourdes, maintenant donnez-nous les moyens de communiquer avec elles” ? Si quelque chose du genre est lancé, moi je suis volontaire pour le diffuser largement ! 🙂
– Pour le dernier point, j’avoue que je n’avais pas vraiment envisagé la question de la formation. Je pensais que les sourds avaient davantage accès aux études supérieures… Je fais peut-être trop le parallèle avec mon handicap physique, alors que les problématiques sont tellement différentes. Alors je me réjouis d’avance de voir ces futurs diplômés s’infilter dans tous les domaines de l’emploi, et pas seulement aux caisses des supermarchés ! 😉
J’espère avoir précisé mon point de vue, mon étonnement.
Vous pourriez me dire, précisément, mes mots qui vous ont fait bondir ?
Le contenu me fait bondir, parce que, comme c’est souvent le cas lors qu’il y a des nouvelles dispositions gouvernementales, tout le monde veut proposer des solutions de création d’emploi et d’intégration sociale.
En parcourant votre texte, je me remémore des situations concasses vécues lors de l’organisation de nos ateliers avec des entreprises désireuses d’envisager l’engagement de Personnes Handicapées. C’est généreux aux GRH d’accorder une chance d’emploi à des personnes Sourdes, mais cela ne se règle pas d’un simple coup de baguette magique. Il est indispensable que des actions de formation et de sensibilisation soient proposées aussi bien aux entreprises qu’aux Personnes Handicapées. Ces démarches sont fortement recommandées au préalable à tout engagement dans une entreprise. Sans quoi le projet est souvent voué à l’échec.
Dans un soucis de démystification de la Personne Handicapée et de ses difficultés, chaque fois que c’est possible, on rappelle aux GRH que ce n’est pas gagné d’avance.
Les différentes situations décrites dans le texte montrent que les Personnes Sourdes n’ont pas reçu, au préalable à leur engagement, une formation minimale. Pour ma part, je trouve cela regrettable, car la majorité des Sourds sont des personnes sympathiques qui aiment le contact humain.