J’y croyais vraiment moi. Je croyais vraiment que ça allait être un grand et beau moment, même si bien sûr il y aurait des râleurs. Loin d’être la seule, c’est une des raisons qui m’ont fait choisir Hollande. Il s’agissait quelque part de s’excuser humblement pour toutes les saloperies dramatiques que les homos ont pu subir ces derniers siècles, de réparer quelque chose, de dire « désolée que ça vienne seulement maintenant, on a été con mais c’est du passé ». Enfin une loi qui allait prôner l’égalité plutôt que de diviser. Hé ben mon cochon…
Femme, handicapée, pas très riche, je ne suis pas forcément du côté « dominant » de la société. Mais j’ai la facilité d’être née blanche et hétéro, et j’en ai conscience. Je ne crois pas avoir fait preuve un jour d’homophobie, tout au plus des maladresses probablement, mais avec l’effort de faire au mieux. Je porte pourtant ma part du fardeau d’hétéro-normativité. J’aurais sûrement pu faire beaucoup mieux que « ne pas être homophobe », ouvrir un peu plus ma gueule, protester, dénoncer. Je peux rien pour la plupart des connards qui ont défilé dimanche, mais quand même, depuis ma situation confortable, je ne peux que me sentir concernée.
Depuis quelques semaines, je lis et entends des horreurs et je me décompose, je tremble de partout, et je chiale, oh oui je chiale beaucoup. Je ne découvre pas l’homophobie, je savais bien qu’elle existait, mais dans ma petite bulle je n’y étais pas directement confrontée. Voir cette parole nauséabonde se libérer, totalement décomplexée, c’est tout autre chose.
Je tremble en me disant « pourvu que mes potes LGBT ne tombent pas là dessus ». Bien sur qu’ils voient tout ça, bien sûr qu’ils y perdent un paquet de plumes. Chaque jour, je les vois encaisser, plus ou moins bien. Plutôt mal en fait. Ca se fissure de partout, même les plus solides, les plus assumés, affirmés, détachés… Ca rit jaune, ça ne rit même plus du tout, ça saigne sévère. Des blessures indélébiles. Je constate ça concrètement, au jour le jour, et je rechiale un bon coup.
Je ne sais pas quoi faire. Je crois que je voudrais sauver le monde, et que tout le monde s’aime, mais il paraît que c’est pas possible. Et j’ai beaucoup de mal à renoncer à ça. Je perds foi en plein de choses (pas Dieu hein, ça c’est fait depuis longtemps, mais l’avenir, l’humain, la discussion, l’idée même de faire des gosses dans ce monde de merde) Je tourne en rond sans savoir que faire. Un deuxième clip serait dérisoire. Je vais à toutes les manifs possibles, je racole un max, je fais tourner les liens importants jusqu’à écoeurement. Ca fait une semaine que je rumine cet article sans trouver les mots nécessaires. Tout ça aussi est dérisoire.
Je voulais juste vous dire combien je suis désolée.
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